La présentation du Plan national vélo par le gouvernement le 14 septembre 2018 à Angers a été unanimement salué par l’ensemble de la presse et des associations spécialisées comme un changement radical de perspective et le qualifie de « véritable plan digne de ce nom ». Pour s’en rendre compte, il suffit de lire la synthèse que le CC37 a réalisée.
Notre fédération, la FUB, fédération des usagers de la bicyclette, s’est félicitée de la reprise par le gouvernement d’un nombre important de ses propositions. D’ailleurs, dans le document gouvernemental présentant le Plan vélo, un encadré d’un tiers de page fait référence au Baromètre des villes cyclables pour justifier certaines de ses décisions.
La justification du Plan vélo est la suivante :
Les 5 avantages du vélo pour les cyclistes et la collectivité
- La santé
- La transition écologique et énergétique
- L’attractivité des villes
- L’accès à la mobilité pour tous au moindre coût
- La création d’emplois
Les freins à l’usage du vélo
- L’insuffisance et les discontinuités des aménagements cyclables sécurisés
- Les vols de vélos
- Un cadre n’incitant pas à l’usage du vélo
- Les obstacles d’ordre culturel et le déficit d’image
Nous en connaissons depuis longtemps l’argumentaire puisque c’est celui que nous développons depuis plusieurs années (voir les développements dans le document gouvernemental, p. 6 à 8).
Le point de vue de la FUB
Une avancée incontestable qui doit marquer le début d’une politique sérieuse !
Les mesures annoncées fixent un cap important pour la Solution vélo, en annonçant un Plan vélo avec quatre axes :
- la sécurité et la résorption de coupures urbaines,
- la lutte contre le vol de vélos,
- les incitations financières et
- le développement d’une culture vélo.
L’Etat se donne pour la première fois les moyens de viser un cap : le triplement de la part modale du vélo d’ici 2024, pour passer de 3 à 9 %, contre 10 % en Allemagne et 28 % aux Pays-Bas. A titre de comparaison, à Strasbourg 16 % des travailleurs se déplacent à vélo, à Grenoble 15,2%, Tours se situe à la cinquième place avec 7 % des actifs (INSEE, 2017).
Par ailleurs, c’est un plan interministériel : ministère de l’Intérieur, ministère de la Transition écologique et solidaire (dont le ministère des Transports), ministère de la Cohésion des territoires, ministère des Solidarités et de la Santé, ministère du Travail, ministère de l’Education nationale, ministère de l’Action et des Comptes publics, ministère de l’Economie et des Finances, ministère des Sports… Il engage donc l’Etat dans toutes ses composantes.
Toutefois, l’animation de ce plan devrait être assurée par le ministère des Transports, la FUB s’inquiète des conditions pratique de cette animation.
MAIS, à ce concert de louanges, les associations spécialisées sont unanimes pour critiquer la faiblesse des moyens financiers consacrés à ce Plan vélo.
Le Plan vélo prévoit 350 millions d’euros d’investissements sur 7 ans, soit 50 millions d’euros par an, alors que le Conseil d’orientation des infrastructures (structure de conseil et d’avis auprès du ministre des Transport) a estimé les besoins à 200 millions d’euros par an. Le Plan national vélo ne répond donc qu’à un quart des besoins annuels estimés.
C’est cette même estimation qu’ont retenue les associations du Réseau Action Climat (la Fondation Nicolas Hulot, France Nature Environnement, le WWF ou Fonds mondial pour la nature, la Fédération des Usagers de la Bicyclette, La Fédération nationale des associations d’usagers des transports, Greenpeace pour la protection de l’environnement, etc.), ainsi que le Club des Villes et Territoires cyclables, dont un des vice-présidents est Michel Gillot adjoint au maire de Saint-Cyr-sur-Loire, président du groupe vélo de Tours Métropole Val de Loire.
Tous estiment que ce plan constitue « une avancée » mais que les moyens engagés ne sont pas à la hauteur des ambitions et doivent être revus à la hausse par le gouvernement d’ici le projet de loi de finances 2019.
Ainsi, l’unanimité dans la critique des financements fait écho à la l’unanimité dans la louange de la cohérence du plan.
Les financements sont en deçà des besoins des collectivités locales pour accélérer la réalisation d’itinéraires cyclables et de stationnement vélo, pour la résorption des coupures urbaines (1) et le rétablissement des continuités piétonnes et cyclistes dans les territoires, la réalisation de réseaux express vélo (2) et de liaisons inter-agglomérations, le rabattement à vélo vers des modes de transports collectifs, le stationnement vélo dans les équipements publics, les gares et dans le cadre des opérations de rénovation urbaine et la poursuite du schéma national des véloroutes et voies vertes.
Ainsi, la France est bien loin des 4 euros par habitant et par an que les gouvernements danois et néerlandais consacrent à la bicyclette, ont renchéri les associations du Réseau action climat (RAC). Elles réclament 200 millions d’euros par an pour « résorber le retard ».
On est encore loin des 3 euros par Français et par an qui, s’ajoutant aux 7,7 euros par habitant et par an que les collectivités consacrent en moyenne à la politique vélo, permettraient d’atteindre le seuil des 10 euros par habitant que recommande le Club des villes et territoires cyclables pour agir sur tous les leviers d’une politique vélo.
Concernant le développement d’une culture vélo, le dispositif scolaire « Savoir rouler » ne sera généralisé qu’en 2022 dans toutes les écoles primaires, soit dans quatre ans. Et que dire de son effet : les parents autoriseront-ils leurs enfants à aller seuls au collège à vélo ? Certainement à Chambray-les-Tours et à Saint-Avertin qui ont conçu des itinéraires dédiés, mais certainement pas à Tours ! Et que dire, dans Tours et ailleurs dans la métropole, des problèmes de stationnement sécurisés pour tous les cyclistes, en particulier dans les immeubles modernes et les quartiers anciens.
Envisagés sur Tours Métropole, les travaux d’aménagements à réaliser sont immenses. La prospective de l’Agence d’Urbanisme de l’agglomération tourangelle évalue à quinze le nombre d’ouvrages d’art nécessaire à la réalisation d’un schéma directeur cyclable ambitieux, mais à horizon 2030, soit dans 12 ans ! Le projet de deuxième ligne de tramway intègre cinq ouvrages d’art pour les mobilités actives, soit un tiers des besoins pour une échéance à 2024-2025. Là aussi, c’est le signe que le vélo fait réellement partie des modes de transport à prendre en compte, ce qui est fait. Mais au vu de la faiblesse de l’enveloppe financière du Plan national vélo, quelle marge de manœuvre peut avoir Tours Métropole Val de Loire pour concevoir les infrastructures qui lui manquent cruellement ?
1. Une coupure urbaine est un obstacle physique ou psychologique compliquant les déplacements de proximité des piétons, des cyclistes et des services de collecte, de distribution, de desserte et d’urgence. Frédéric Héran, 2015.
2. Exemple de définition sur le site de la Mairie de Paris : « Le REVe – Réseau Express Vélo – sera constitué d’aménagements protégés à double sens, continus et homogènes. Leur largeur garantira le confort, la sécurité et la cohabitation de l’ensemble des cyclistes. »
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