La passerelle Fournier : un usage modéré, mais constant
Le parti pris, préalable à la conception de cet aménagement modèle 2017, est fondé sur un ensemble d’observations dont il est ressorti que l’ancienne passerelle était faiblement utilisée mais toujours utilisée, tout au long de la journée et de la nuit, et avec toujours quelqu’un qui y passe au minimum tous les quarts d’heure. De ce fait, elle est aujourd’hui éclairée la nuit.
Par ailleurs, l’absence de signalisation, l’absence de bandes cyclables dans son prolongement et l’absence d’intégration dans un réel plan de circulation de la ville de Tours en font un équipement confidentiel.
Une simple observation sur l’usage actuel de la passerelle rénovée semble valider ce point de vue, elle donne bien l’impression d’un usage limité, mais constant à l’exception de deux moments dans la journée et la semaine : aux entrées et sorties des écoles et collèges, aux heures de marché (Velpeau), qui expliquent une sur-fréquentation momentanée.
La passerelle Fournier : une demande citoyenne d’accessibilité aux vélos
De manière constante depuis 2008, les élus et les services techniques ont été régulièrement interpellés par plusieurs interrogations au CVL-Est et par plusieurs vélorutions sur la nécessité de prévoir une accessibilité aux vélos. Depuis 2011, la question des rampes d’accès est débattue. En 2012, le groupe citoyen de la Passerelle Fournier revendique depuis trois années l’organisation de deux ou trois vélorutions par an sur la passerelle Fournier, contre l’immobilisme des élus.
Un constat s’impose, que ce soit la municipalité de Jean Germain ou celle de Serge Babary, que ce soient les services techniques de Tours Plus et on ne sait quel élu de référence de l’agglomération, dans tous les cas la demande citoyenne n’a pas paru légitime auprès d’eux. Et puisque ce ne sont pas les usages qui déterminent l’équipement, ce ne sont que les coûts. Or à trop vouloir faire des économies, le risque est grand de ne faire que n’importe quoi.
Nous ne discuterons pas ici des choix techniques-esthétiques de la passerelle. Par contre nous constatons que la largeur (2,40 m) est la largeur minimale à attribuer à ce type d’équipement. Son utilisation, un samedi en fin de matinée, un cycliste et cinq piétons allant à des rythmes différents dans le même sens, valide cette appréciation, la cohabitation doit être précautionneuse.
Pourtant, n’a-t-on jamais vu un pont routier dont les bretelles d’accès seraient plus étroites que le pont lui-même ? Et bien, pour les piétons, les vélos et les fauteuils roulants, c’est possible. La preuve !
Les rampes d’accès à la passerelle Fournier : ni fait, ni à faire !
L’examen critique de la réalisation est fait d’ouest en est, du Sanitas à la rue Edouard Vaillant. L’arrivée sur la passerelle Fournier, par la rue Jacques Marie Rougé, se fait par une vaste esplanade de forme quasi-rectangulaire (20 m – 8,5 m – 12 m) qui donne directement, en face, à l’escalier de la passerelle ou à droite à la rampe d’accès à la passerelle. Cette esplanade réalisée en béton identifie clairement ce nouvel espace d’accès. Problème, l’accès direct à cette esplanade est bloqué par un trottoir, dans la continuité de celui de la rue Jacques Marie Rougé. On aurait pu imaginer et attendre une ouverture totale de cette esplanade par un linéaire de niveau zéro rendant parfaitement accessible ce nouvel espace. Au lieu de cela, il faut aller chercher à 1,60 mètre de l’escalier un tout petit accès (2 m), invisible à la descente de la rampe à vélo, où poussettes, vélos et fauteuils roulants doivent obligatoirement passer par ce bateau, qui plus est aménagé en véritable tape-cul. Dit autrement, alors qu’il y a manifestement de la place et une circulation automobile faible en ce lieu, les concepteurs obligent les utilisateurs à se concentrer sur un même passage étroit, proche de la descente de l’escalier.
Dans l’escalier, une goulotte a été coulée dans le béton. Elle n’est praticable que par des personnes en pleine forme et avec un vélo léger, non chargé par des sacoches.
Une rampe d’accès permet de gravir avec aisance une pente à 4 % qui se monte facilement et permet de croiser, sans s’arrêter, piétons ou vélo classique. Seule la crainte en fera s’arrêter certains, c’est dire que les 1,60 m (théoriques) en réalité entre 1,58 et 1,56 entre les deux rambardes, font un peu juste, à vrai dire étriqué. Au passage de l’épingle à cheveu (ouest), beaucoup mettront un pied à terre pour tourner à 360° sans crainte. L’espace est très contraignant à cause du vide créé par une descente d’escalier. La plateforme fait 2 m de large pour 3,72 de longueur. Il est évidemment inconcevable de se croiser avec quiconque en cet endroit. On ne peut que s’étonner ici de l’absence d’une plateforme circulaire suffisamment large, permettant aux cyclistes de tourner et de se croiser dans les virages avec aisance. Il y avait matériellement la place de faire tout autrement. Que dire du trou béant de 1,80 m qui domine l’escalier ? A partir de quel âge un enfant, seul, est-il réellement capable d’appréhender ce danger ?
L’arrivée sur la passerelle elle-même bénéficie d’un rétrécissement à 1,48, au lieu de 1,56 auparavant. A cet endroit précis, cela implique une gestion consensuelle des files d’attente au risque de collisions.
La sortie de la passerelle par la rampe hélicoïdale se fait par un rétrécissement à 1,50, préparatoire à la largeur de la rampe à 1,40 entre les balustrades.
Le bas de la rampe hélicoïdale se fait par une autre épingle à cheveux où il est impossible de tourner sans mettre un pied à terre. En sortie de l’hélice, la piste a la largeur théorique de 1,77 m, mais elle est réduite à 1,08 par un poteau métallique de soutien d’une plateforme supérieure, puis 2 m plus loin par un autre poteau à 1,11 m. Il va sans dire que cet aménagement final constitue une sorte d’apothéose de non-qualité de l’équipement. Sur quelques cinq mètres, il est évidemment impossible de se croiser. Nous avons vu un groupe de dix touristes sur vélo de course. Sur l’épingle à cheveu, huit ont mis un pied à terre, un les deux pieds, un seul n’a pas quitté ses pédales. Cette situation est totalement aberrante puisque les poteaux auraient pu être dégagés de la piste et la plateforme de l’épingle à cheveu agrandie, il suffisait de déplacer le muret d’au minimum1,5 m. Tout était possible puisque le muret a été construit spécifiquement. Dans les deux cas, ce sont les plus mauvais choix qui ont été retenus.
Il y a du vice dans la conception des accès cyclables à cette passerelle, des rampes d’accès étroites qui rendent délicats les croisements, des épingles à cheveux quasi impossibles à négocier sur un vélo classique, sans mettre pied à terre, et le positionnement incongru de poteaux sur une piste rétrécie juste avant une épingle à cheveux et une montée dans le sens est-ouest.
La conception et la réalisation de cette passerelle Fournier vont entrer dans l’histoire de la ville de Tours comme la référence absolue de ce qu’il ne faut pas faire. Ce n’est pas un travail d’aménageurs, mais d’apprentis non diplômables, incapables de répondre aux besoins présents et futurs des usagers.
Les tourangeaux méritaient mieux !
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